Dans le journal de la Croix-Rouge Française (CRf) "AGIR ENSEMBLE"1 du dernier trimestre 2010, on pouvait trouver une intéressante brève, dans la rubrique actualités, sur le rapatriement sanitaire de 35 irakiens chrétiens réchappés de l'attentat perpétré à Bagdad, le 31 octobre 2010, où 53 personnes avaient trouvé la mort.
Cette petite note, très factuelle, et sans véritable caractère d'analyse, interpelle par les informations qu'elle nous communique ainsi que sur le réelle besoin de réflexion qui est pourtant mis en évidence à la lecture de telles données.
On y apprend qu'à la demande du ministère des affaires étrangères, la CRf avait déployé le 8 novembre 2010, soit une semaine après l'attentat, une opération du type "plan rouge", à l'aéroport d'Orly à Paris, pour accueillir ces 35 irakiens sur le territoire français. Rappelons que le "plan rouge" n'est pas une opération anodine ni une action d'accueil. Il s'agit d'un plan d'urgence, destiné à secourir un nombre important de victimes, dans des situations catastrophiques qui nécessitent, parallèlement, de lutter contre le sinistre initial et de soustraire les victimes au milieu hostile 2. Des conditions d'urgence, et de pertinence qui ici font défaut.
Pour répondre à l'arrivée de ces 35 personnes la CRF nous informe pourtant qu'elle a mis en place un important dispositif et que plus d'une centaine de volontaires de la région est venue contribuer à cette opération. Soit près de 3 secouristes pour 1 "victime"... ! Des personnes dont rien n'indique pourtant que l'état de santé justifie une telle démesure, nous n'avons d'ailleurs pas de détail à ce sujet dans l'article, ce qui compte ce n'est pas les victimes, ce sont les moyens de la CRf. Si les moyens humains on été colossaux, donc, on reste sans voix quand on apprend que 25 ambulances et 8 minibus étaient également venus appuyer le dispositif. Soit près d'un véhicule par personne !
La capacité de réaction de la Croix-Rouge ne fait plus aucun doute, les moyens dont elle dispose sont extrêmement impressionnants autant que la motivation de ses bénévoles qui affluent donc par centaines pour aider. Mais c'est probablement sa capacité à organiser, à penser l'action, à utiliser correctement les ressources qui interroge désormais. L'action conduite est elle la plus appropriée ? Répond elle on aux besoins des personnes que l'on assiste ? Les sommes engagées le sont elle à la juste mesure de ce qui est nécessaire ?
La décision de la mise ne place du "plan rouge" ne relève pas de la Croix-Rouge mais du préfet, certes, néanmoins doit on inscrire son action dans des dispositifs inadaptés aux besoins ? Par ailleurs les moyens mis en place dépendent, eux, de la Croix-Rouge. Mais quelle a été ici la logique d'un tel déploiement ?
Pouvoir communiquer dans son magazine sur son importante capacité de réaction ? Répondre au besoin d'action de bénévoles (qui on le sait sont toujours très nombreux pour les opérations médiatisées ? Espérons que non, espérons que quelqu'un se soit interrogé sur les besoins des personnes assistés avant de s'interroger sur les moyens a engager; que quelqu'un se soit interrogé sur l'impact de ces moyens sur les personnes que l'on assiste. Des questions pourtant affichées comme priorité par le plan d'action stratégique 2015 de la Croix-Rouge française sous le titre "mieux mobiliser les acteurs de l'association".
1. N°53 - octobre - novembre - décembre 2010
2 Circulaire no 86-318 du 28 octobre 1986 (Ministère de l’Intérieur), relative à « la planification des secours immédiats en présence de nombreuses victimes ».
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