"Vous voulez les pauvres secourus - je veux la misère abolie"
Victor HUGO.

lundi 26 avril 2010

La neutralité vole sur un nid de coucous


Le Monde et le journal LePoint se faisaient l'écho de l'apparition, le 20 avril, d'un nouvel outil au service de l'action humanitaire. "Un site internet pour lutter contre les liaisons dangereuses entre trafiquants et humanitaires". Il s'agit là d'une initiative du Sipri (lʼinstitut international de recherche sur la paix de Stockholm), appelée Eticalcargo suite à un rapport de Hugh Griffiths publié en mai de l'année dernière sur le trafic des armes légères grâce à certaines compagnies aériennes. L'avenir nous dira, peut-être, dans quelle mesure les ONG "consommatrices" peuvent influencer leurs "fournisseurs" aériens, reste tout de même que le problème semble posé à l'envers sans que cela n'étonne les deux quotidiens. Il est évident que les organisations humanitaires partagent et véhiculent des idéaux incompatibles avec ceux des trafiquants. Néanmoins ce n'est pas - pour une grande partie d'entre elles - leur objectif, ni même leur mandat, que de lutter contre ces trafics. 
Le Monde nous rappelle la "bénédiction" que les autorités françaises apportent à cette initiative, chargeant par la même les ONG d'une mission qui relève surtout des autorités policières. Rappelons, avant d'aller plus loin, que les autorités françaises n'avaient pas manqué, à une autre époque, d'apporter leur assistance au mouvement de libération Biafrais en chargeant des armes et des mercenaires dans les avions de la Croix-Rouge Française*.
Car en effet, Olivier Truc, l'auteur de cet article du Monde ne semble pas avoir compris les intérêts qui relèvent d'une recherche de Neutralité. C'est certain les ONG vont éviter, quand elles le pourront, ces "liaisons dangereuses avec les trafiquants" et peut-être cet outil y contribuera t-il; Mais il ne s'agira pas tant de lutter contre ces trafiquants que de chercher à s'affranchir de relation avec les milieux armés, quels qu'ils soient! J'en conviens, toutes les ONG ne s'inscrivent pas encore dans cette démarche - je vous recommande à ce sujet l'excellent texte de Fabrice Weissman sur les relations OTAN/ONG - Néanmoins  la question des "liaisons dangereuses" va plus loin que celle des trafiquants et la confusion entre les acteurs humanitaires et ceux du maintien de la paix ne doit pas être entretenue à cette occasion comme le fait le Sipri dans sa présentation

* Voir l'interview du Colonel Benjamin Adelunke dans - Le Monde du  9 septembre 1969.   

jeudi 22 avril 2010

Tribune


LeTemps.Ch publie dans sa rubrique "opinion", en partenariat avec la revue Globe de l'IHEID, une série de 3 articles consacrée au droit  humanitaire (DIH). Louise Doswald, professeur de droit international s'y livre, dans une réflexion souvent abordée sur la capacité du DIH à prévenir les atrocités, plus à des rappels évidents qu'à un argumentaire solide et prend bien soin d'éviter d'apporter une réponse à sa problématique. 
En revanche, David Sylvan et Davide Rodogno, deux professeurs de science politique consacrent, eux, les deux derniers articles à une analyse intéressante sur les interventions militaires à objectifs humanitaires dont je vous recommande la lecture - ici et .


vendredi 16 avril 2010

Tribune - Haïti, le souci des solidarités locales

Il y a un mois, Philippe Ryfman, membre du conseil d'administration d'ACF et chercheur associé à Paris-I, publiait dans le Monde un article intitulé: "Haïti: les leçons humanitaires".  Si les opérations humanitaires sont toujours (souvent) l'occasion d'une remise en cause de leurs pratiques par les acteurs humanitaires, le traitement médiatique important qui a entouré la crise en Haïti permet la publication de nombreuses réflexions et la comparaison de celles-ci. 

mercredi 14 avril 2010

Actualité


Le site d'informations anglais de la BBC et la radio Française RFI annonçaient hier, 13 avril 2010, l'enlèvement de huit employés du CICR. Les organisations internationales et non-gouvernementales communiquent en général très peu sur ce genre d'événements, le traitement médiatique d'un enlèvement étant très souvent une contrainte pour le processus de négociation. 
Pour exemple, et sans retirer au mérite de 'Médecins sans Frontières' pour la façon dont elle à conduit les pourparlers suite à l'enlèvement de deux de ses employées à Port-au-prince le 5 mars 2010, ni à sa très bonne réputation en Haïti, c'est en grande partie grâce au silence médiatique qui à entouré cette affaire que les deux jeunes femmes avaient été libérées rapidement.   
  
Toutefois le site internet du CICR fait, hasard du calendrier,  depuis quelques jours, sa une sur un entretient très intéressant de Dominik Stillhart intitulé: "Entre guerre et criminalité : l'assistance humanitaire dans les contextes à haut risque" dans lequel le directeur adjoint du comité rappel la neutralité de l'organisation comme un principe essentiel à la sécurité de ses employés. En ne prenant fait et cause pour aucun partie et en travaillant sur l'acceptation du CICR part tous les belligérants, le CICR assure sa sécurité. 

La recherche de la neutralité et de l'indépendance par le CICR pour assurer la sécurité de ses équipes est une stratégie qui semble avoir fait ses preuves. On s'interrogera cependant sur le rôle des sociétés nationales de la Croix-Rouge, qui elle, loin d'être indépendantes, sont souvent auxiliaires publiques des Etats où elles opèrent (c'est notamment le cas en France où la nomination de son président dépend du cabinet de la présidence de la république). Par ailleurs, cet enlèvement comme les quelques cas où le CICR à du retirer ses employés internationaux des terrains de conflits, rappellent que malheureusement les organisations humanitaires ne sont pas neutres simplement en déclarant qu'elles le sont et qu'il est nécessaire de réaliser un important travail de communication pour que chacune des parties sur le terrains identifie qui est le CICR parmi la multitude d'ONG et autres acteurs parfois partiaux qui sont déployés sur le terrain. Ils soulignent qu'on ne contrôle pas la perception qu'ont les interlocuteur qui travaillent avec nous. Mais il est, à l'inverse, naïf de penser que tout les enlèvement de personnel international humanitaire soit le résultat d'une mauvais communication ou d'une mauvaise compréhension des belligérants. Les populations sur place sont parfois très informés sur les différents acteurs de l'aide internationale, il  et c'est aussi parce que ce personnel international peut représenter un enjeu stratégique, médiatique ou économique qu'il est visé. 



vendredi 9 avril 2010

Anecdote



Les campagnes d'appel aux dons qui suivirent les drames du tsunami en 2004 et du tremblement de terre à Haïti de janvier dernier on très largement renouées avec la tendance compassionnelle et parfois misérabiliste de la communication humanitaire de ces dernières années. A l’occasion de la journée mondiale de l’eau du 22 mars, Solidarités International a cette fois créé un événement original utilisant l’eau comme média. Un mur événementiel, a été installé à Paris et a délivré pendant une semaine des messages provoquant la prise de conscience. Loin de ce misérabilisme commercial, la communication des ONG s'affiche ici à la pointe de la tendance faisant même la une du célèbre blog du monde graphique: Fubiz.  



Solidarité from La Boite Concept on Vimeo.

mercredi 7 avril 2010

Tribune


Dans le journal Le Point du 7 avril 2010, Sylvie Brunel, l'ancienne présidente d'Action contre la Faim, spécialisée dans les questions de développement et notamment de la famine, se livre, à l'occasion de la sortie de son livre: la planète dysneylandisée, à une réflexion sur l'eco-tourisme. L'objet de cette interview s'écarte de nos préoccupations mais il reste intéressant de relever les critiques qu'elle formule ici à l'égard de l'industrie du developpement durable. Critiques qu'elle avait au préalable formulées à l'encontre de l'action humanitaire dans son roman Frontières où elle dénonçait, là encore, les dérivent marchandes de certaines ONG.  



Pour les lecteurs que le sujet intéresse je conseillerais cependant plutôt de lire le texte de d'André Gortz paru en 1974 intitulé "leur écologie et la notre" qui traitait déjà de la récupération de l’écologie par l’industrie et les groupes financiers. Un texte que le Monde diplomatique re-publie dans son numéro du mois de d'avril 2010. 

jeudi 1 avril 2010

Anecdote - Clic droit humanitaire


Souvenez vous, le 27 juin 2008 le célèbre informaticien américain et richissime propriétaire de Microsoft, quittait sa société pour se consacré à sa fondation humanitaire, créée 8 ans plus tôt. Aujourd'hui il semble qu'un autre ponte du milieu informatique se décide, fort de sa réussite, à se lancer dans des actions de soutien au milieu de la solidarité internationale. En effet Chris Hughes, l'un des fondateur de Facebook s'apprête à lancer le 1er réseau social humanitaire au monde. Au retour d'un voyage au Sénégal qui l'aurait profondément marqué, il a ainsi décidé de créer Jumo afin de "permettre un rassemblement des individus et des ONG, en vue de changer le monde". Argument commercial ou véritable conviction humaine, il n'en demeure pas moins que l'humanitaire semble être à la mode comme à la pointe de la technologie. 

SOURCE: AGORAVOX 


Toutefois cette information viens relancer la nécessité d'une réflexion sur l'évolution de "l'humanitaire" - je prends soin ici de ne pas en définir la notion - dans son rapport aux médias, de pus en plus sociaux. Et plus généralement soulevé l'intérêt d'une étude prospective sur l'évolution de la communication et du plaidoyer des ONG. Alors que la question avait donné lieu à d'enflammés (et historiques) débats entre Philippe Bernier et Bernard Kouchner il y a de ça bientôt 40 ans, elle est, aujourd'hui encore, on ne peut plus d'actualité. L'ONG s'affiche, ou se comporte, avec l'utilisation des nouvelles technologies de l'informations, de plus en plus comme un média. Comment se considèrent elles vis à vis de ses nouveaux outils et réseaux ? Le portail francophone de la solidarité internationale s'interroge lui, très justement sur cette migration "obligée" vers l'internet. Dans quelle mesure les ONG évoluent elles en médias ou répondent à une demande du public, la question reste ouverte.    


Je vous propose à ce titre une petite vidéo du laboratoire de l'innovation social (traduit de l'espagnol)  qui vient apporter un peu d'eau au moulin de cette réflexion.